Entre décembre 2009 et mai 2010, j’ai publié un blog, de manière anonyme, sous le titre « Les carnets de l’ange aveugle – Le Paris de Balzac n’existe pas ». Dès mai 2010, j’ai détruit ce blog, qui comptait 35 articles. N’ayant pas correctement sauvegardé les fichiers, je croyais ces textes définitivement perdus. C’était sans compter sans la précieuse initiative que constitue la Wayback Machine, mise à disposition par le projet Internet Archives. Cet outil a scanné le blog à diverses reprises et en a heureusement conservé la totalité des textes. Seules les images n’ont pas été sauvegardées, mais j’ai conservé la plupart d’entre elles. J’ai donc pu reconstituer le blog de manière fidèle, avec néanmoins quelques variantes possibles sur les photos qui ont été sélectionnées. Une partie de l’interactivité, malheureusement, s’est perdue ou est devenue obsolète.
L’introduction du blog, par laquelle il convient de commencer sa lecture, disait ceci :
« Le Paris de Balzac n’existe pas. Lorsque j’ai commencé à lire Balzac, j’avais seize ans, je croyais que ce monde existait, et qu’un jour il me serait donné de le parcourir. Les noms de rues, de places, de boulevards, résonnaient dans le vide. Je ne les connaissais pas, et je n’arrivais pas à dresser un plan fictif du labyrinthe. Je perdais ainsi le sens de ce décor urbain, dont il nous est dit qu’il est tellement important pour la caractérisation des personnages. On ne devrait pas lire Balzac à seize ans. Cela vous fait mal. Vous n’avez rien vu dans votre ville de province et vous croyez pouvoir aborder les femmes comme Felix de Vandenesse aborda Madame de Mortsauf. Sauvage et gauche. Les femmes de Balzac n’existent pas, pas plus que le Paris de Balzac. Cette découverte vous fait plus mal encore, et ce ne sont pas les inévitables adaptations cinématographiques ou télévisuelles qui vont vous guérir de cet amer constat.
Voilà que je viens de m’inventer un remède à ce vieux mal : photographier les lieux balzaciens dans leur état actuel, immergés dans leur cruelle banalité, et souvent, dans leur absence même. Il ne s’agira pas d’établir la vraisemblance, d’essayer de retrouver telle ou telle façade. Pas de soucis de repérage. La simple envie de voir ce qu’il en est, pour se débarrasser de fantômes. Décaper la littérature par le regard neuf de la photographie. »
Lorsque j’avais choisi le pseudonyme « L’ange aveugle » pour signer ce blog, il s’agissait évidemment d’un clin d’oeil à mon patronyme et d’une ironie paradoxale sur ma supposée cécité à mon environnement (vous savez, ces fonctionnaires européens qui ne voient rien). J’ignorais que L’ange aveugle était déjà le titre d’un roman de Tahar Ben Jelloun ou encore d’une photographie de la vidéaste belge Marie-Jo Lafontaine. Curieusement, une des rares photographies que je n’ai pu retrouver était celle de la bande-titre : la statue d’un petit ange aux yeux bandés, que j’avais saisie lors d’une promenade aux Puces de Saint-Ouen.
Pourquoi ai-je arrêté et détruit ce blog, quelques mois à peine après l’avoir entamé ? Sa préparation et sa rédaction était chronophage. Je vivais à l’époque à Strasbourg et ne venait qu’épisodiquement à Paris, ne pouvant donc continuer la démarche de repérage systématique des lieux nécessaire à la correcte tenue de l’archivage photographique que j’avais imaginé. Je trouvais quelques occasions de balzaquer à l’étranger, à l’occasion de missions à Berlin ou à Bruxelles. Je me souviens même d’avoir lu la rare pièce de théâtre Les ressources de Quinola avec le projet de profiter de deux missions à Barcelone pour fournir l’iconographie d’un « Balzac à Barcelone », jamais écrit. La manie absurde menaçait déjà. Mais surtout, écrire sur Paris, en troisième année du mandat d’un Président de la République dont l’ambition, la soif de pouvoir, les prétentions culturelles dérisoires paraissaient tout droit sorties de l’univers de La Comédie humaine (ou peut-être aussi du Lucien Leuwen de Stendhal) présentait pour moi, alors fonctionnaire européen tenu au devoir de réserve, un certain risque, même sous couvert d’anonymat.
Peut-être serait-ce à présent que je suis devenu parisien (un provincial wallon le devient-il jamais ?) une bonne idée de reprendre ce blog, qui, dans son état actuel, se termine bien bizarrement sur un article relatif à Bruxelles et cette exclamation « Les Belges aiment Balzac. Ah, la vache ! ». Ce n’est pas le matériel qui manque, en particulier les photographies. Nous verrons bien.
Paris, 1er novembre 2016.
P.S. 18 mai 2021. Pour je ne sais quelle raison technique, les photographies du blog n’étaient plus disponibles. Je viens de terminer une seconde « restauration ». La plupart des photographies de cette époque ont été prises avec un caméscope numérique et non avec un appareil photo. Cela explique le caractère un peu imprécis de certaines d’entre elles, que je n’oserais plus publier aujourd’hui. Mais je préfère les conserver en l’état plutôt que de les remplacer, lorsque cela serait possible, par des photos faites avec des appareils plus récents.
Ordre chronologique de publication des articles
Au début de « La Comédie humaine »
La rue Saint-Denis
5, Rue du Sentier
Au coin de la Rue de la Paix
1, rue du Hasard
A l’Opéra
Nouvelle fraternité française, dans les Champs-Elysées
Place du Châtelet
Parmentier, la station la plus patate
Un libraire, 18 rue Vivienne
Au Salon
La Place Royale, la Vielle Dame et les squatteurs
Les feux follets de la rue du Tourniquet Saint-Jean
Eric Rohmer, mort d’un expert balzacien
Rue Hillerin-Bertin : Balzac et la petite masseuse chinoise
Tempête de neige
Tremblements de terre
Un hôtel du côté des Invalides
La Chambre des Députés
Aristocratie du Faubourg Saint-Germain
Rencontre avec un sculpteur dans le Jardin des Tuileries
Le luxe, le sang, la boue et les mégots
Le Père Goriot sur Nintendo DS
Les auras ouvertes du Collège Henri IV
Le trésor de Toussaint-Louverture et l’ordonnance de Charles X sur l’indépendance de Haïti
La « Comédie humaine » et mon hypodontie douloureuse
Fraîcheur de la langue : sorbonne et tranche
M. de Granville mène double ville – 1. La rue Vielle du Temple et ses alentours
M. de Granville mène double ville – 2. Peinture blanche rue Taitbout
La République, une grande et forte fille
Mal branché, une petite brève de librairie
Balzac à Berlin : l’ange, le café et le scooter
Zéro de cola, Rue neuve Saint-François
Les biscottes de Bruxelles, sans préfaçons
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