Semez, semez la graine
Aux jardins que j’avais.
Je parle ici de la sirène idéale et vivante,
De la maîtresse de l’écume et des moissons de la nuit
Où les constellations profondes comme des puits grincent de toutes
leurs poulies et renversent à pleins seaux sur la terre et
le sommeil un tonnerre de marguerites et de pervenches.
Nous irons à Lisbonne, âme lourde et cœur gai
Cueillir la belladone aux jardins que j’avais,
Je parle ici de la sirène idéale et vivante,
Pas la figure de proue mais la figure de chair,
La vivante et l’insatiable,
Vous que nul ne pardonne,
Ame lourde et cœur gai,
Sirène de Lisbonne,
Lionne rousse aux aguets.
Je parle ici de la sirène idéale et vivante.
Jadis une sirène
À Lisbonne vivait.
Semez, semez la graine
Aux jardins que j’avais.
Que Lisbonne est jolie.
La fumée des vapeurs
Sous la brise mollie
Prend des formes de fleurs.
Nous irons à Lisbonne
Ame lourde et cœur gai,
Vous que nul ne pardonne,
Lionne rousse aux aguets.
Semez, semez la graine,
Je connais la chanson
Que chante la sirène
Au pied de la maison.
Nous irons à Lisbonne
Ame lourde et cœur gai,
Cueillir la belladone
Aux jardins que j’avais.
Il est minuit très noire,
La nuit toutes les fleurs,
Versez, versez à boire,
Sont de même couleur.
Je connais la sirène
Je connais sa chanson:
Voyez sa robe traîne
Et charme les poissons.
Mais la graine qui germe
Connaîtra pas ses fleurs.
Chaque jour a son terme,
Chaque amour ses douleurs.
(…)