Insulte

Nouvelle vie. Ce matin, au bureau, j’ai envoyé à la poubelle vingt-deux ans d’archives administratives, de notes de travail, de papiers inutiles. Immense soulagement. Liquidation totale. Puis, cette après-midi, ma nouvelle vie commence, un peu bizarrement. Je passe chez l’opticien pour faire ressouder une paire de lunettes qui ont failli prendre leur congé avant moi. Monture confisquée pendant une heure : ma nouvelle vie s’ouvre donc par un moment de désoeuvrement. Dans le flou qui rend tout incertain, pas d’autre solution que de passer à la librairie pour trouver un livre compagnon de cette heure perdue. Un livre qui se lise en passant. Je m’installe ensuite au Bar de l’Opéra. Un rayon de soleil traverse la porte, éclaire ma seule table, donne du relief aux grains de la page, enrichit l’éclat d’un rhum ambré. Je lis : « Tous les gens que j’ai vus travailler m’ont gêné. Sinon les simples artisans. Je ne sais quelle malheureuse notion de choix, de foi, de vocation ils mêlent à leur long martyre, de conscience professionnelle et autres âneries du même tonneau, qui ne font que remplacer avantageusement ce qui leur manque. L’essentiel. La paresse est sans doute la plus difficile, la plus fatigante façon d’être qui soit. (…). » Dans ses Papiers collés, Georges Perros m’insulte au moment précis de l’existence. J’adore.

Strasbourg, 20 février 2015

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