M. Finkielkraut prend le taxi.

Les chauffeurs de taxi parisiens ne sont pas tous de vieux bougons réactionnaires. Celui qui m’emmène hier soir de l’Avenue Kléber à la rue Saint-Maur a quarante quatre ans et la gouiaille sympathique, n’est-ce pas M’sieur. Il est tout content d’aller rue Saint-Maur, c’est là que je suis né, près de Saint-Ambroise. J’avais mes potes, on jouait dans la rue, puis on a dû partir, j’avais sept ans. Je me risque à évoquer le passé glorieux de la rue pendant la Commune. Ah oui, c’est bien vrai ! C’est pour celà qu’on a fait des grands boulevards, pour faciliter les charges de cavalerie. Place de la Concorde, notre conversation tourne vers l’actualité politique. Il me dit tout le respect qu’il a pour la Garde des Sceaux. Qu’est-ce qu’elle n’a pas enduré, la pauvre, se faire traiter de guenon par une gosse. Moi je suis ignorant, mais je la respecte. Et ce Monsieur Bismuth, si c’est vrai cette histoire, c’est pas de la politique, c’est de la délinquance, hein, M’sieur. Arrivés à la Bourse, nous parlons Europe. Je n’y comprends pas grand chose, on nous explique mal, tous ces comités, ces commissions. Je partage mon anecdote favorite, celle de Baroso interdit d’antenne sur France 2 juste avant le référendum sur la Constitution, puis celle de Finkelkraut qui confond les deux Cours européennes. Ah, Finkielkraut, cet intellectuel éminent, je le connais. Vous savez, je suis un enfant de la télé, je regarde, je capte, je connais mes clients. Un jour, je l’ai pris en charge. Je lui ai dit bonjour, Monsieur Finkielkraut. Il est sorti immédiatement en claquant la porte, a pris le taxi du confrère, juste derrière. Ça m’a fait de la peine, je voulais juste être poli, hein M’sieur. Nous voilà rue Oberkampf. J’aime l’Est parisien.