La délectation du bouffon sordide pour la plaisanterie antisémite macabre se trouve déjà dans Le Neveu de Rameau.
« LUI, le Neveu, le bouffon, raconte avec un méchant délice l’histoire du renégat d’Avignon qui a livré son « son bon ami l’israélite dont la sainte Inquisition s’empara à son réveil, et dont, quelques jours après, on fit un beau feu de joie ».
MOI (le philosophe) : « Je ne sais lequel des deux me fait le plus d’horreur ou de la scélératesse de votre renégat, ou le ton dont vous en parlez.
LUI : Et voilà ce que je vous disais. L’atrocité de l’action vous porte au-delà du mépris ; et c’est la raison de ma sincérité. J’ai voulu que vous connussiez jusqu’où excellais dans mon art ; vous arracher l’aveu que j’étais au moins original dans mon avilissement, me placer dans votre tête sur la ligne des grands vauriens, et m’écrier ensuite, Vivat Mascarillus, fourbum imperator ! Allons, gai, monsieur le philosophe ; chorus. Vivat Mascarillus, fourbum imperator !.
Et là-dessus, il se mit à faire un chant de fugue, tout à fait singulier. (…).
Comment se conclut la rencontre entre le philosophe et le bouffon sordide ? : le philosophe, saisi d’horreur, s’en va : « Je m’enfuis, lui me criant : « Philosophe, écoutez donc, écoutez donc. Vous prenez les choses au tragique ». Mais j’allais toujours et j’étais bien loin de cet homme que je m’en croyais encore trop près. M. le Roy m’a dit qu’il avait beaucoup de pareils. Ma foi, je ne saurais le croire ».
Strasbourg, 19 janvier 2014.