OS EMIGRADOS
Sós nas grandes cidades desamigas,
Sem falar a língua que se fala nem a que se pensa
Mutilados da relação com os outros
Que depois contado na pátria os triunfos da sua estada.
Coitados dos que conquistam Londres e Paris!
Voltam ao lar sem melhores maneiras nem melhores caras
Apenas sonharam de perto o que viram —
Permanentemente estrangeiros.
Mas não rio deles. Tenho eu feito outra coisa com o ideal?
E o propósito que uma vez formei num hotel planeando a legenda?
É um dos pontos negros da biografia que não tive.
LES EMIGRES
Tout seuls dans les grandes cités inamicales,
Sans parler la langue qu’on y parle ni celle qu’on y pense,
Amputés de la relation avec les autres,
Eux qui plus tard raconteront dans leur patrie les triomphes de leur séjour.
Misère de tous ceux qui vont à la conquête de Londres et de Paris !
Ils retournent dans leur foyer sans de meilleures manières ni de meilleures têtes
Ils n’ont fait que rêver de près ce qu’ils ont vu –
Perpétuellement étrangers.
Mais je ne me moque pas d’eux. Ai-je fait autre chose de mon idéal ?
Et le projet qu’une fois j’ai formé dans un hôtel, planifiant la légende ?
C’est l’un des points noirs de la biographie que je n’ai pas eue.
Traduction de Patrick Quillier, in Fernando PESSOA, Oeuvre poétique, Coll. La Pléiade, Gallimard, 2001.