Une belle italienne d’époque entre Genève et Lausanne
Dans Le petit soldat de Jean-Luc Godard (1960), nous rencontrons pas moins de trois belles lectrices. La première d’entre elles se trouve dans le compartiment du train Genève-Lausanne de 14 h.18 qu’emprunte le militant d’extrème-droite Bruno Forrestier (Michel Subor). Lui-même lit A l’écoute de l’espace. Elle, bien mise, la trentaine épanouie, apparemment une bourgeoise milanaise qui pourrait sortir d’un film d’Antonioni, lit le numéro de Pâques du magazine italien Epoca. Elle observe Forrestier par dessus son magazine, paraît séduite. Epoca est-il un signe distinctif pour que deux clandestins se reconnaissent ? Non. A la gare suivante, elle descend en hâte.
La mère de famille et son petit Classique Larousse
Quelques instants plus tard, Forrestier se lève pour se diriger vers l’arrière du train. Sur une banquette, une mère de famille, accompagnée de son petit garçon, lit un petit Classique Larousse. Je me souviens qu’ils avaient à l’époque une couverture mauve, mais je n’arrive pas à en lire le titre. Qui m’aidera à le déchiffrer ? Dans un film de Godard, aucun indice, surtout une femme en train de lire, n’est innocent.
La troisième belle lectrice, dans Le petit soldat, est bien évidemment Veronica Dreyer (Anna Karina). Forrestier est venu dans son appartement pour la photographier. Il lance le fameux « Le cinéma c’est la vérité vingt-quatre images par seconde » et disserte sur la difficulté de diriger les acteurs. Véronica n’arrache pas une page au journal de Satan, mais lui montre une reproduction, dans un livre d’art, de L’acteur de Paul Klee. « Vous aimez Klee ? ». Serait-ce la clef du film ?